Comment gérer le départ des fondateurs ?
Version texte
Yaël Question d'asso, le podcast part et pour les asso. Les membres ne restent jamais éternellement. Ce constat, légèrement fataliste pour commencer un épisode, est néanmoins une réalité que les associations doivent anticiper afin d'assurer leur pérennité. Cela est d'autant plus vrai en ce qui concerne le départ de celles et ceux qui jouent un rôle de direction dans les associations, et tout particulièrement quand ils ou elles ont été les fondateurs ou fondatrices. Que se passe-t-il lorsque les fondateurs d'une association décident d'en partir? Comment penser les modèles organisationnels qui permettent les transitions et pérennités de l'action associative? Et même, quel rôle donner aux fondateurs dans les associations? Ce sont ces questions que nous allons vous proposer d'aborder dans ce 16e épisode déjà de Questions d'Assos, le podcast par pour les Assos, en partenariat avec la MAIF et la Métropole de Lyon. Pour aborder cette thématique, nous recevons aujourd'hui Meven et Grégoire, membres salariés de Ping, association nantaises, qui proposent des espaces de pratique et de réflexion pour explorer le numérique et ses enjeux et contribuer à l'émancipation de toutes et tous. Bonjour.
Meven Bonjour. Bonjour.
Yaël Nous sommes également accompagnés de Margaux Langlois, docteur en gestion et enseignante chercheuse à Paris School of Business. Bonjour Margaux. Bonjour. Pour animer ce podcast, j'ai moi-même le plaisir d'être accompagné par Karl. Salut Karl.
Karl Salut Yael.
Yaël Cet épisode de Question d'asso est réalisé par Guillaume Desjardins de Synchron TV sur une musique de Sound of Nowhere. Vous pouvez vous abonner à Question d'asso sur votre plateforme de podcast préférée, sur Apple Music, Google Podcasts, mais également Spotify, Deezer, SoundCloud et Peertube. Vous pouvez également écouter ce podcast directement sur notre site web question-asso.com où vous retrouverez une version textuelle de ce podcast. Nous sommes très heureux d'être avec vous pour ce nouvel épisode de Question Astro. Installez-vous confortablement et c'est parti! Karl, c'est ton tour pour l'édito.
Karl Merci beaucoup Yaël. Si d'habitude, on vous parle dans Question d'Asso, principalement de développement de l'action associative, aujourd'hui on va aborder ensemble et avec Ping ce qui arrive inévitablement à un moment de la vie d'un bénévole, c'est-à-dire son départ. En l'occurrence, on va ici parler d'un type de bénévole particulier, celles et ceux qui fondent des associations. Bon, il se trouve que ce sujet nous intéresse avec Yael, puisque nous avons respectivement cofondé nos associations, le Mouton Numérique et Designers Ethiques, et la question du départ des fondateurs est donc une étape qui nous concerne directement, et qui concerne même d'autant plus Yael que moi, puisque tu es précisément en train de quitter la direction du Mouton. D'ailleurs, nous sommes tous les deux dans une situation encore plus particulière puisque nous avons cofondé ces associations, donc avec d'autres personnes, ce qui n'est pas sans poser d'autres problématiques, on en refera peut-être un épisode un jour. Alors pourquoi le départ des fondateurs est-il plus particulièrement un sujet que celui d'autres dirigeants de l'association, voire d'autres membres? Eh bien selon moi, parce que ces fondateurs jouent un double rôle dans la vie de l'association. Premier rôle, ils portent la responsabilité de l'activité associative. En tant qu'initiateur du projet associatif, ces fondateurs prennent un engagement moral à s'investir suffisamment dans l'association pour que celle-ci perdure dans le temps. A priori, personne ne crée une association pour faire le constat six mois plus tard qu'il n'y a plus de membres actifs et que l'association périclite. Partir, c'est donc assumer le risque que l'engagement associatif des membres ne soit pas du même ordre que celui qu'on avait nous-mêmes projeté. Le deuxième rôle fort des fondateurs, c'est la définition du projet associatif. Pourquoi l'association existe? Qu'est-ce qu'elle cherche à produire comme effet? Et donc, quelle est son activité? partir, c'est là aussi assumé que le projet associatif évolue, car il sera repris par les prochains membres et dirigeants de l'association, et ces derniers auront nécessairement une vision différente, parfois même opposée. On vous renvoie ici à notre épisode avec Radio Albigès pour comprendre à quel point une direction d'association peut aller dans un sens opposé à la vocation initiale de cette même association. Sauf que tout ce que je vous raconte là, c'est le point de vue du fondateur qui chérit son bébé et qui craint de le voir transformer, voire pire, de le voir mourir après son départ. Un point de vue particulier, certes, mais compréhensible, tant l'investissement dans un projet associatif, peut être fort et sûr de nombreuses années. Je suis sûr que toutes les auditrices et les auditeurs qui sont fortement investis dans leurs associations depuis de nombreuses années comprendront ce sentiment. Mais qu'en pensent les autres membres de l'association? L'avis des fondateurs, finalement, doit-il être si important dans la vie et le devenir de l'association? Rappelons qu'une association n'appartient ni à ses membres, ni à ses fondateurs, et que ses statuts sont finalement là pour la protéger d'éventuelles dérives d'orientation ou de gestion de ces derniers. Finalement, la situation du ou des fondateurs initiaux omniprésents dans la vie de l'association, si elle se justifie d'un point de vue pratique dans les premières années, elle porte tout de même une dimension dirigiste qui laisse le plus souvent peu de place à la démocratie associative. Là encore, il y a elle et moi, on peut en témoigner, les premières versions des statuts de nos associations respectives laissaient peu voire pas de pouvoir aux autres membres de l'association. Et en tout cas, dans mon cas, il a fallu pas mal d'années pour que ça, ça évolue. Et on est d'ailleurs toujours en train de le faire évoluer. Ces constats nous amènent donc inévitablement à devoir considérer le départ des fondateurs, non pas comme un risque pour l'association, mais comme une étape probablement nécessaire de mue de l'association vers une gouvernance plus démocratique, partagée, et qui passera, s'il le faut, par une reconfiguration du projet associatif. Le tout en évitant l'émergence d'un nouveau dirigeant omniprésent pendant une autre décennie, ce qui nous renverrait à la caisse départ, et en évitant également qu'elle périclite en l'absence de volonté d'engagement des autres membres. Bon, je dois vous avouer qu'en formulant tout ça, je me fais un peu peur à moi-même, Et donc, c'est bien pour lever ses peurs que nous avons décidé de faire cet épisode, non pas avec un fondateur d'associations qui en serait parti, ce qui nous aurait amené à parler finalement de son ressentiment, mais avec celles et ceux qui ont pris la suite après le départ du fondateur de leur association, c'est-à-dire les salariés et les bénévoles de l'association Ping, aujourd'hui représentés par Meven et par Grégoire. Rebonjour à tous les deux. Rebonjour. Rebonjour, Karine.
Yaël Meven, Grégoire, merci d'être avec nous aujourd'hui pour partager le mode de fonctionnement de Ping et nous expliquer un peu comment s'est passée la transition. On vous propose, avant de rentrer dans le vif du sujet, de commencer par une carte d'identité de l'association, histoire que les auditrices et auditeurs comprennent un peu mieux comment vous situez dans le grand paysage des assos. Alors, est-ce que vous êtes prêts? Première question, est-ce que vous pouvez nous décrire l'activité de Ping? Qu'est-ce que vous faites?
Grégoire Alors, Ping, c'est une nébuleuse d'action et d'activité. Donc, on va essayer de faire simple. Il y a quatre gros pôles d'activité, on va dire, pour définir les actions actuelles de Ping. On a l'animation d'un Fab Lab, l'animation d'un Fab Lab citoyen ouvert à tout curieux, qui a envie de s'essayer à la pratique des machines à commande numérique pour faire un peu ce qu'il a envie. Ça peut être du ludique, ça peut être du pro, c'est pas à nous de juger. On accueille et on accompagne. On a ensuite un pôle qui va être axé sur la formation professionnelle, parce que Ping est une association, mais une association a besoin d'argent et la formation professionnelle peut être un moyen d'avoir de l'argent en plus de passer l'ensemble des idées qu'on a pu développer au sein de l'association depuis bientôt 19 ans. On a un pôle animation des réseaux professionnels de la médiation numérique parce que la culture numérique, c'est aussi venir en appui et en accompagnement des professionnels qui vont outiller et accompagner les personnes en difficulté sur le numérique. Et le dernier pôle qui va être davantage de l'exploration recherche autour de grandes thématiques entre le numérique et finalement notre société? Comment repenser son mode de consommation et de production à niveau local grâce au Fab Lab? Comment penser son rapport du temps au temps et avec le numérique? Comment repenser l'environnement et le numérique? Voilà, des petits thèmes assez légers et simples à traiter en exploration.
Meven Peut-être qu'on peut compléter en juste racontant ce qu'on fait aussi nous personnellement dans l'ASSO. Moi du coup je m'occupe plutôt de ce qui touche aux questions de recherche et d'exploration dont on vient de parler.
Grégoire Et moi, double casquette, enfin, triple ou quadruple, co-directeur de l'association Ping depuis peu de temps, et on reviendra peut-être dessus tout à l'heure, et chargé de projet sur les sujets d'inclusion et médiation numérique.
Yaël Top, merci beaucoup pour ce premier aperçu. Est-ce que vous pouvez nous dire maintenant comment vous êtes financé, en gros, comment se structure votre budget et quelle est l'enveloppe à peu près globale?
Grégoire Alors, pareil, Ping, c'est un peu le bazar en termes de stabilité économique. On a eu des budgets à 700 000 euros, on a eu des budgets à 300 000 euros. Bref, en 20 ans, il y a eu des péripéties ici, mais bon, ça c'est milieu associatif, on ne vous apprend rien. À l'heure actuelle, 2022, on est à 500 000 euros de budget annuel. On est à 75% de subventions publiques, 12% de prestations, qui vont être de la formation ou l'accompagnement sur des ateliers techniques. 1% environ d'adhésion et le reste du pourcentage un peu divers et varié. Ça peut être des fondations, ça peut être des dons, des legs. Non, pas trop de legs d'ailleurs, c'est bien dommage. Grosso modo, c'est un peu le souci.
Speaker 5 C'est un appel.
Grégoire C'est ça. On n'a pas encore le formulaire de legs, mais n'hésitez pas à me donner. Grosso modo, c'est ça la structure économique. Chez nous, ce budget passe essentiellement dans le salaire des salariés. Nous sommes à l'heure actuelle, en 2023, 6 salariés, plus 2 services civiques, généralement. On a toujours des binômes de services civiques, parce que c'est assez chouette d'avoir des personnes qui sont dans la même situation et qui ont un autre rapport au monde du travail, qui peuvent avoir un retour d'étonnement aussi sur l'ensemble de nos activités, la clarté notamment de nos actions. Et je dis actuellement parce qu'en fait, on a perdu pas mal de salariés dernièrement suite à le retrait d'un gros financeur. Donc voilà, période un peu complète qui a été passée, mais voilà.
Yaël Top, merci. Du coup, ça fait très bien le lien avec la dernière question de la carte identique. Et comment est-ce que vous êtes organisé? Est-ce que vous pouvez revenir un peu? Peut-être, donc là, tu l'as dit, vous êtes six aujourd'hui dans l'équipe. Mais comment est-ce que ça organise? Comment vous prenez vos décisions? Est-ce qu'il y a un CA? Quelle place vont peut-être vos bénévoles aussi?
Meven Ce n'est pas facile de répondre à cette question parce que c'est quelque chose qui a un peu évolué au fur et à mesure de l'histoire de la structure. Et comme peut-être une chose à préciser, on disait qu'on est salarié. Nous, on a un fonctionnement, une gouvernance assez spécifique entre salariés. Et on a aussi une gouvernance associative avec un CA, un bureau. Et du coup, il y a plusieurs échelons un peu de cette démocratie associative. Mais peut-être pour ce qui nous touche un peu directement dans le travail qu'on mène, à savoir peut-être commencer par l'organisation, nous, des salariés. Elle a toujours eu, pour autant que j'en connaisse de l'histoire de Ping, vocation à être plutôt horizontale, avec l'idée que les décisions qui concernaient l'ensemble des salariés devaient être prises collectivement. Mais selon certaines périodes, pour pouvoir faire avancer des questions de stratégie, de budget, de RH un petit peu au quotidien, la mise en place d'échelons un petit peu intermédiaires qui permettaient de suivre ces thématiques-là de manière plus resserrée. Aussi parce qu'on a un temps de travail assez limité, somme toute et tous, et on ne peut pas non plus complètement passer tout notre temps en réunion. Et pour une structure de notre taille, on fait déjà un certain nombre de réunions. Et puis, peut-être pour donner des grandes marques, on a eu un fonctionnement, en gros, à peu près au moment où on arrive avec Grégoire dans la structure, donc il y a quatre ans, qui était plutôt avec cette idée où on était un plus grand nombre de salariés, du coup, une dizaine. On prend les décisions collectivement, mais il y avait trois personnes qui étaient le CODEV, l'acronyme ça doit être quelque chose comme comité de développement, qui font avancer un peu ces sujets dont je vous parlais avant de manière plus resserrée au quotidien. Suite notamment au départ de Julien, qui est fondateur de l'association et qui a été aussi salarié pendant toutes ces années, on a un peu revu notre fonctionnement associatif et du coup je vais peut-être passer la parole à Grégoire pour qu'il puisse en parler aussi
Grégoire peut-être juste pour compléter un tout petit point les décisions sont prises collectivement mais ça n'empêche pas qu'il y ait sur certaines actions des micro décisions avec des micro instances qui donnent des noms rigolos et totalement absurdes par exemple on va avoir le COAC prochainement qui va se mettre en place communauté d'organisation d'animation collective on a aussi les fameux PAF les points PAF, c'est à dire une réunion de 15 minutes PAF, rapide pour préparer différentes actions et la fameuse plancha qui est là vraiment ça vient du terme planche, board, mais vu qu'on n'aime pas l'anglais on va transformer en planche, planche un peu tristoune plancha pour traiter des sujets brûlants donc là plancha c'est tout le monde qui est autour de la table et on aborde absolument toutes les thématiques mais en effet sur des actions on sait que le Meven a très bien dit, ça prend beaucoup de temps donc on n'est pas tout le temps mobilisé sur chacune des décisions en permanence et il y a des micro task force, je n'aime pas ce terme, mais en tout cas des micro-groupes qui se réunissent et qui prennent des décisions. Ça c'est côté salarié. Après en effet on est dans une association, donc on a un bureau et une grande transparence aussi dans les informations et finalement l'initiative d'une activité ou d'une action peut provenir des deux pôles. C'est-à-dire que les salariés peuvent être forces de proposition pour développer un nouveau chantier totalement. On a un sujet qu'on sent émerger, qu'on a envie de traiter et on veut se l'approprier, on fait un CA. Généralement, on a un CA une fois tous les deux mois, globalement, en temps de crise un peu plus rapproché. Et on a testé une version en distanciel. Il y a assez peu de temps, qui était... J'ai oublié le nom, d'ailleurs. Un flash CA. En fait, le principe, c'est que là, on n'est pas forcément dans l'échange et la prise de décision, on est plutôt sur de la retransmission d'informations de l'équipe salariée vis-à-vis des bénévoles. Parce qu'ils ont un travail, ils sont occupés, ils ne peuvent pas s'investir au même niveau que les salariés. Et donc, une fois tous les deux mois, c'était des fois un peu long entre des projets, des demandes de financement, des trucs qui devaient avancer. Donc, pour contrebalancer ce temps-là, on a mis en place ces FlashTA qui sont des instances en visio sur une heure, un temps limité, très peu finalement de décisions. On est sur la passation d'informations et on prend les grosses décisions lors du CA présentiel la fois d'après.
Meven Pour ajouter une petite précision sur la distinction entre ces deux temps, on est une association qui vient d'un milieu aussi un peu geek. Donc pour nous, les CA, en général, c'est de manière assez collective autour d'une table avec des pizzas et des bières. Et du coup, ça demande quand même un peu de temps d'organisation, aussi d'investissement des bénévoles pour qu'ils puissent venir sur ce temps-là, se déplacer. Il y en a qui peuvent habiter loin. Donc ce flash CA, c'est aussi un intermède à distance qui fait que des gens peuvent participer peut-être de manière un peu plus rapprochée. Oui, carrément.
Yaël Peut-être, juste pour avoir une précision, parce que je trouve ça intéressant que vous parliez de bénévoles pour parler de membres du CA, alors que généralement, les bénévoles, on les distingue... Enfin, je sais...
Grégoire Oui, on a un souci sémantique à Ping entre adhérents, bénévoles, membres. On n'arrive pas à faire une distinction très clairement. Enfin, je trouve, personnellement, tu pourras me contrer à son souci. Mais nous, les bénévoles, c'est des membres de l'association, dans le sens, ils sont à jour de leur cotisation. on prend le terme juridique classique mais en vrai les projets de PING sont tellement en partenariat avec énormément de structures qu'on a plein de membres qui sont enfin pas de membres plein de bénévoles qui sont pas forcément membres tout le temps non plus par exemple là à côté on enregistre à Hyperlien, à côté il y a un bénévole du Human Lab une structure qui cohabite avec nous dans le lieu bon c'est pas le sujet du podcast mais c'est juste pour dire il gravite là et finalement il nous file aussi des coups de main de temps en temps sur des actions que nous on peut mener alors pas spécialement, pas ce bénévole là particulièrement c'est un mauvais exemple mais il y a d'autres bénévoles de structure avec qui on gravite et qui finalement contribuent à l'activité de l'association Ping sans pour autant qu'ils aient leur carte de membre qu'ils soient adhérents, qu'ils soient agents des cotisations et en fait c'est pas très grave, il y a plein d'acteurs avec qui on collabore et c'est pour ça, membre, adhérent, bénévole c'est plutôt le sens de l'engagement et l'investissement tant que les gens sont prêts à mettre l'utilisation des termes bénévoles est plutôt dans ce sens là je suis prêt à donner du temps au projet et adhérent et plutôt je viens consommer une partie du projet et peut-être ultérieurement je donnerai du temps mais pour le moment je ne suis pas dans ce statut-là.
Meven Les derniers mots que vient d'avoir Grégoire sont très justes, notamment il y a beaucoup de gens qui adhèrent à l'association parce que c'est requis pour accéder à nos lieux. En fait on a un Fab Lab et des gens adhèrent à l'association pour venir utiliser une machine, mais du coup ce n'est pas du tout la même démarche que venir participer au projet associatif de ping, Ça peut être juste avoir besoin d'utiliser une machine à ce moment précis. Et du coup, c'est là où la distinction pour nous n'est pas forcément évidente entre est-ce qu'un adhérent est quelqu'un qui contribue au projet associatif ou est-ce que c'est juste quelqu'un qui va venir consommer le lieu? Il y a peut-être un troisième niveau qu'on n'a pas évoqué, c'est le bureau.
Grégoire Alors évidemment, c'est assez classique dans les assos, le triptyque, CA, bureau, équipe, salarié. La petite particularité chez Pink, c'est qu'en fait, il y avait un bureau avant un CA. Et c'est où d'un moment, le bureau s'est dit, tiens, c'est chouette, mais on n'est pas si nombreux que ça, ce serait bien d'élargir. Et d'habitude, c'est plutôt à l'inverse. On se dit, il y a un CA de base qui compose l'asso, en tout cas de mes expériences. Et ensuite, de ce CA naîtra un bureau. Et là, en effet, c'est le bureau qui s'est dit, il nous faut une instance plus large pour consulter sur des sujets moins RH et moins gestion en fonction employeur du quotidien. Et prendre un peu de hauteur et justement avoir une orientation plus politique au sens noble du terme. Orientation stratégique pour la structure, mais avec des grands axes de réflexion. Donc le bureau est né à posteriori du CA.
Karl Le CA est né à posteriori du bureau, pardon. Ce qui fait justement la transition peut-être avec l'histoire de l'association. Donc en fait, pour le redire, tous les deux, vous êtes là depuis 4 ans. C'est une association qui a 20 ans aujourd'hui. qui a eu une vie assez longue pour une association, notamment dans le domaine du numérique, qui a donc été fondée par des membres qui sont aujourd'hui partis. Et donc, la première question qu'on souhaitait vous poser, c'est est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu de l'histoire de l'association? Qui l'a fondée? Comment? Et en fait, est-ce que l'association des premiers jours était particulièrement éloignée en termes de modèle organisationnel de celle qu'elle est aujourd'hui?
Grégoire Alors, on va essayer de retranscrire ce qu'on a compris de l'histoire de Ping, parce qu'en 19 ans, il y a forcément des récits cachés, des récits vrais, des récits glorifiés. Toujours est-il, le récit caché qui est intéressant, c'est qu'il y a deux fondateurs, Alexandre Loriaux et Julien Bélanger, qui sont très rapides, qui gravitaient dans le monde numérique. Notamment, il y a un secret caché que nous révélerons peut-être à ce micro, c'était que Julien Bélanger travaillait chez Microsoft. Et il s'est dit, bah tiens, Microsoft, c'est le mal. Si je fondais une association qui travaille sur le numérique libre, basée sur les logiciels libres, et donc la contribution et le partage au plus grand nombre. Donc c'est comme ça. Il a fait mon honorable en confondant cette association. Et au début, en effet, c'était ces deux personnes-là, plutôt sur du temps un peu bénévole, mais très rapidement, il me semble, ils ont eu l'optique justement d'en faire leur métier. Et très rapidement, ils sont devenus salariés aussi de l'association. Et donc, on s'est retrouvé aussi avec cette double focalisation à la fois de porteur du projet sur son temps professionnel et porteur du sens symbolique en tant que fondateur aussi. Donc, on a eu les premières années, donc en 2004, la fondation de l'association Ping et qui tournait autour, si je ne dis pas de bêtises, de la création de sites Internet pour les structures associatives. L'objectif était de dire, le milieu de l'ESS, ils n'ont pas forcément beaucoup de thunes et en même temps, les grands groupes qui proposaient des sites internets ne comprennent pas leurs besoins. Essayons de mettre des trucs un peu intelligents pour les acteurs locaux. Donc c'était plutôt des sites internets à destination des associations nantaises. Il n'y avait pas une volonté d'expansion, de passage à l'échelle. On était déjà utilisation des logiciels libres pour que ça puisse servir au plus grand nombre.
Meven Il y a quand même déjà à ce moment-là des questions de valeur et de sens qui sont très fortes dans la structure. Ce n'est pas juste faire des sites internet pour des assos. C'est quelque chose qui prend un peu la suite des mouvements associatifs, du développement des automédias, notamment à Nantes. Et du coup, ça prend part un petit peu à cette dynamique qui vient aussi des mouvements sociaux.
Grégoire Et donc, comme dans toute vie associative, l'association évolue, change, part sur d'autres champs d'activité. On a pu explorer les arts numériques dans les années 2006, partir sur les Media Lab en 2011. Puis tout d'un coup, il y a un truc qui émerge du côté du MIT, un truc comme les Fab Labs. Et on se dit, tiens, ce serait chouette d'en faire un, mais pas tout seul. Donc, on va voir des écoles de Nantes, on va avoir deux, trois acteurs. on essaye de fonder le premier Fab Lab de Ping, parce qu'il y en aura d'autres par la suite, Plateforme C, dans un magnifique hangar mal isolé, avec un peu d'amiante et des pigeons. Et ensuite, on se met à se dire, tiens, la médiation numérique, c'est aussi chouette. Et ensuite, une vie associative assez classique et traditionnelle. Sachant qu'à chacune de ces étapes, justement, l'association a aussi grossi, a gagné en légitimité, a appris, je pense aussi, le relationnel avec les élus et politiques de Nantes Métropole, du département, de la région, et donc à gagner aussi en visibilité, en légitimité auprès des institutions.
Karl Et si je peux me permettre, quand tu dis l'association a appris, est-ce que c'est justement les deux cofondateurs, notamment Julien, qui ont appris, ou est-ce que c'est déjà une connaissance, ou est-ce qu'il y a déjà d'autres salariés qui sont là à ce moment-là avec ces connaissances-là?
Grégoire Alors, très rapidement, je crois que de deux, ils sont passés à quatre, de mémoire, Et je ne sais pas si Julien écoutera ce podcast un jour, mais tant pis, je me lâche. Je crois que c'est dans l'ouvrage de Starhawk, où il y a typologie justement des personnes dans la construction d'un projet collectif. Julien est un corbeau. Il voit de loin, il voit de haut, il a une idée d'un projet super intéressant, mais dans la structuration, des fois, c'est un peu plus compliqué. Et donc, très rapidement, ils se sont entourés d'une personne qui est en capacité de structurer le projet, de le cadrer, de le normer, de dire non mais là c'est n'importe quoi, on va redescendre un tout petit peu d'un niveau et ça sera quand même très bien. Et je pense qu'il y a eu cette intelligence collective, et là je ne peux pas dire est-ce que c'est Julien, est-ce que c'est les deux, est-ce que c'est les bénévoles qui sont entourés le projet aussi à la naissance, qui ont permis d'avoir ce bon casting. Mais j'ai l'impression qu'une des forces qui a eu à Ping et qui a toujours, c'est complémentarité dans les profils entre le visionnaire, le gestionnaire, la personne qui fait la relation entre les acteurs, à la fois au sein de l'équipe, mais aussi avec les adhérents et les bénévoles, et le relationnel avec les institutionnels. Donc Ping, au début, ça a un peu constitué ces différentes typologies d'acteurs. En tout cas, encore une fois, avec le recul qu'on a, on a quatre ans d'ancienneté dans la structure, c'est comme ça qu'on a compris son histoire, et quand on a interrogé Julien, en effet, sur les personnes, quand il était encore là, de qui composait le collectif de Ping au début. Donc voilà, c'est pas forcément lui qui incarnait le fondateur qui incarnait les relations avec les institutionnels tout le temps. Mais par moments, c'était lui qu'on envoyait quand même faire des discours, serrer des pâtes, manger des cocktails. Et surtout, il avait une posture très désinvolte qui était très rafraîchissant dans ces milieux-là et qui a fait du bien à la fois pour sa santé mentale à lui et qui a fait du bien à la structure associative de Ping en étant « Ok, vous faites des choses sérieuses et potentiellement un peu compliquées, Mais en même temps, vous êtes totalement accessible et vous pouvez travailler avec un peu tout le monde, même si on insulte les gars femmes régulièrement lors de ces réunions-là. Mais bon, c'est notre histoire.
Meven Si on veut faire des sauts dans le temps et arriver un peu plus proche de nous, je pense que c'est... Mais je ne vais pas faire de la psychologie sur Julien, mais je pense que c'est des choses qui font qu'au bout d'un moment, c'était aussi lourd à porter. De se retrouver à être le point nodal, la phase publique de l'iceberg ping, c'était... C'est un collectif avec des profils très divers, qui est compliqué à expliquer parce qu'on fait plein de choses. Et du coup, c'était facile d'avoir une personne un peu cible vers laquelle se tourner pour chaque personne qui avait une question pour la structure. Et ça fait partie des choses qui, dans la transition, ont dû nous pousser un peu dans les retranchements, de continuer à maintenir ses liens, continuer à faire en sorte que ce travail un peu relationnel quotidien que lui acceptait de mener, même sur son temps personnel, même potentiellement des fois les soirées, les week-ends, qui sont des choses qu'à titre personnel, moi, je ne m'autorise pas à faire et je n'ai pas vraiment d'appétence pour ça. Je ne pense pas que ce soit le cas de Grégoire beaucoup non plus. Donc voilà, c'est des fonctionnements qui avaient été ancrés au fur et à mesure et qu'à un moment, soit on a essayé de déconstruire, soit on a essayé aussi de poursuivre parce que c'était aussi nécessaire pour la pérennité de la structure.
Karl Vous n'avez pas du tout parlé, et peut-être que vous ne savez pas non plus comment ça se passait à ce moment-là, mais du rôle justement des bénévoles du conseil d'administration, du bureau, est-ce que c'est des personnes qui jouent un rôle dans cette histoire de l'évolution de l'association? Comment est-ce qu'en fait se fait ce lien entre les adhérents et les salariés?
Grégoire Il y a beaucoup d'adhérents qui sont rentrés au CA et dans les instances de gouvernance de Ping, qui étaient des usagers des lieux. Et en fait, la majorité, quasiment intégralité du CA, ce sont des gens qui sont passés soit dans le Fab Lab, soit dans des workshops, exploration, soit dans des summer labs, des formats d'activités qu'on proposait. Donc à chaque fois, les acteurs qui sont venus au sein de la gouvernance, ce ne sont pas des acteurs qu'on a été chercher à l'extérieur pour gagner un cardinal d'adresse, pour avoir du prestige relationnel auprès des lus, etc. Et donc ils ont joué un rôle de fait parce qu'ils connaissaient le lieu, ils connaissaient les structures, ils connaissaient le fonctionnement et ils participaient à certains projets justement de la structure. Donc ils étaient moteurs référents sur certains sujets, il y en a qui sont passé des sujets Fab Lab, très clairement, il y en a qui sont par les sujets d'exploration et donc c'est comme ça qu'ils sont montés en fait au CA, c'est comme ça qu'ils sont impliqués, c'est comme ça qu'ils ont contribué au projet c'était plutôt une forme je pense de binôme bénévole salarié un peu informel et un peu lâche enfin lâche, souple, dans le sens souple pas du tout lâche, ils se cachaient derrière le salarié pas du tout, où en fonction des besoins, ils étaient mobilisés sollicités, où eux-mêmes se sentaient le besoin de mobiliser les salariés construire un nouveau projet. Et donc, ça a été vraiment du cas par cas. Et en fonction des besoins de la structure et des envies des bénévoles. Plutôt de cette manière-là. Après, il y a un élément qu'on n'a pas encore évoqué jusqu'à présent où on n'est absolument pas exemplaire. Et il ne faudrait pas le dire. C'est notre président.
Karl Ah, on veut savoir.
Grégoire Notre président, ça fait quoi? Allez, 5 ans? Non, ça fait 4 ans qu'on a la structure. Ça fait 3 ans et demi qu'il dit qu'il veut partir. Parce qu'en fait, ça fait très, très, très longtemps qu'il est tête de Ping, je me demande si c'est pas le seul président qu'on a eu. Ah ouais?
Meven J'ai un doute. Alexandre? Non. Non, parce que quand tu lis les statuts, il me semble qu'ils sont déposés au nom de la femme de Julien.
Grégoire C'est vrai. Oui, si t'as raison, c'était Isabelle au début. Ouais, exact. Bref. Et en fait, on a quand même ce bénévole président qui n'est pas fondateur, mais qui est plus que moteur quand même dans les activités et qu'il y a conscience qu'il faut lâcher, qu'il y a conscience qu'il faut partir et il veut partir. Et en fait, là, c'est plus nous, l'équipe salariée, sur ce moment de transition, parce que tout à l'heure, j'évoquais Hyperliens, c'est un nouveau lieu, c'est de l'investissement massif, c'est des complexités justement en termes de financement et de RH, et nous, on avait besoin de s'habiter là-dessus.
Yaël Est-ce que tu peux, parce que je pense que c'est un peu structurant pour la suite, peut-être revenir sur une histoire de ping à travers ces lieux?
Grégoire Oui, bien sûr. On va essayer de faire court quand même. Plateforme C, premier Fab Lab citoyen à Nantes et un des premiers en France, 2013. L'objectif est encore une fois de démocratiser l'apprentissage des technologies numériques et que tout le monde puisse les approprier, les détourner pour faire ce qu'il a envie. Et là, on agresse justement une communauté de bénévoles bricoleurs. Enfin bricoleurs, presque un peu ingénieurs, je dirais. Designer ingénieur qui dit, tiens, chouette, un lieu de créativité et d'émancipation sans le carcan administratif d'une école. Enfin, je schématise et je vais peut-être froisser les universitaires autour de la table, mais voilà, il y avait plus de liberté de création. Expérimentation qui s'est fait en lien quand même avec les collectivités territoriales, à savoir Nantes Métropole et la délégation de services publics de l'île de Nantes, où dès le départ, c'était transitoire. On vous met ce hangar mal isolé avec de l'amiante et des pigeons pour une durée limitée, en attendant qu'on réaffecte un bâtiment qui arrivera prochainement, tout beau, tout neuf, pour vraiment pousser l'expérience encore plus loin. Bon, le transitoire, il a duré 8 ans, 9 ans? Pas loin de 10. Donc c'était un transitoire un peu long. Mais c'était intéressant. Ça a permis de voir des choses. On est parti au début avec un collectif d'acteurs associatifs, créatifs culturels, designers, ingénieurs. Petit à petit, ça a été aussi plus compliqué de maintenir une gouvernance collective entre toutes les structures parce qu'elles ont créé leur Fab Lab dans leur propre lieu de formation. Et on s'est retrouvé finalement à porter le Plateforme C de plus en plus seule, entre guillemets, d'un point de vue politique, mais de plus en plus diversifiée dans les adhérents et les usagers. Donc c'est intéressant aussi, vu que ce sont les adhérents ensuite qui montent à gouvernance et qui viennent revitaliser aussi ces instances de décision. Donc ça, c'est le premier lieu. c'était Plateforme C, qu'on a fermé en décembre dernier. On a fermé pour la dernière fois les portes de ce hangar, mal isolé, qu'on aime quand même beaucoup, malgré le fait qu'on devait bosser en moufles en hiver. Ensuite, on a développé du côté du quartier du Breil, un quartier politique de la ville à Nantes, un atelier partagé. L'objectif du atelier partagé était un peu de reprendre la dynamique des jardins partagés, mais appliquer justement la notion de bricolage convivial. Comment dans un quartier, on peut amener un espace de création, de réparation, de biffurcation aussi professionnelle pour certains acteurs du quartier, en mettant à la fois en place un espace convivial, des machines, des outils et des compétences pour accompagner les personnes à monter en autonomie sur l'usage des pratiques technologiques et numériques. Là, il y avait moins une focale designer, il y avait plus, je pense à une personne en particulier, une retraitée qui vient réparer sa cafetière à la base, où elle a été partagée. Puis après, elle se rend compte, mince, vous avez une imprimante 3D, ça marche comment? Ah bah je dois faire une pièce pour mon espiro. Bon bah très bien, vous faites cette pièce-là, on vous apprend, on vous montre. Et qui revient six mois plus tard, enfin peut-être un an ou deux plus tard, pour finir par faire un puzzle à découpe aux lasers pour sa nièce. Donc on n'est pas tout à fait sur les mêmes profils, on n'est pas non plus sur les mêmes objectifs, on est sur une taille un peu plus réduite, avec des outils un peu moins volumineux, un peu moins techniques aussi. Mais donc, on est sur une dynamique d'éducation populaire, vraiment, et de réappropriation des outils technologiques ancrés dans un quartier politique de la ville. En plus, on avait nos locaux administratifs dans le même bâtiment. Donc, c'était pratique pour nous d'animer ce tiers-lieu. Parce qu'à la fin, il est devenu un tiers-lieu. Sur les dernières années de l'atelier partagé, on a mis en place une gouvernance avec trois autres structures, justement pour partager ce lieu, pour proposer un parcours complet aux habitants de ces territoires-là. Donc une ping, bricolage convivial et numérique en folie. Marie-Alphonse sur accompagnement aux premiers usages numériques et aussi montage vidéo audio. Le coup de main numérique sur accompagnement aux démarches administratives en ligne. Et Naga, Feu Naga, une association qui proposait du reconditionnement de matériel informatique. Donc on avait un peu un package complet pour les habitants de ce territoire pour avoir en un seul lieu différents services qui a trait à la culture numérique. Pardon, je suis peut-être un peu long là-dessus. Et le dernier lieu, le fameux lieu qui devait arriver beaucoup plus rapidement parce que Plateforme C était transitoire, Hyperlien. Hyperlien, un projet dont la genèse a donc commencé en 2016. En fait, c'est ça, je crois. On en a parlé hier soir parce qu'on a à l'heure actuelle, hier était l'inauguration de ce nouveau lieu. Lieu qui a donné bien des sueurs froides aux bénévoles, aux salariés, parce qu'il a mis presque 7 ans à émerger. Mais ça vaut le coup. Et ça vaut le coup, ça vaut totalement le coup. Ce lieu est magnifique. On y est. Pas encore assez sale à notre goût, il va falloir quand même qu'on le crade un peu, mais pour l'esprit fablab.
Speaker 5 Oui, mais là, il est neuf, il est propre.
Grégoire Il est propre, tout à fait. Et donc, oui, Hyperlien, qu'on a attendu longtemps, qui a épuisé quand même aussi les équipes salariées, parce qu'il a mis longtemps à émerger de terre. Donc, à un moment, on avait les finances pour l'intégralité du lieu, sauf que le Covid est arrivé, donc le chantier est deux ans mis en pause. Or, l'État qui nous finançait a dit, « Non, vous devez dépenser les crédits quand vous les avez donnés, pas deux ans plus tard. » Donc, on repart en mode, « Ah bon, on va voir si on y va. » Et puis finalement, le Nantes Métropole nous dit, « Si, si, on vous soutient à mort. » Et la région nous dit, « Ok, aussi. » Bon, on y retourne. Puis finalement, la région dit, « Non, on ne vous soutient plus. » « On vous enlève des sous. » « Ah bon, ok. de dents de scie permanents avec ce projet, qui a épuisé, je disais, les équipes. C'est pour ça aussi qu'il y a une phase de turnover d'une partie de l'équipe qui était plus ancienne aussi. On avait Julien qui avait 20 ans, on avait Charlotte qui avait passé 12 ans, je crois, de mémoire, on avait Maël, 10 ans, Mona, c'était son premier emploi. Donc on a une génération aussi de salariés qui étaient très moteurs, qui portaient énormément le projet dans leur valeur personnelle aussi et professionnelle, qui a passé le relais justement à une autre équipe de nouvelle génération sur la fin de l'arrivée dans Hyperlien. Donc ils sont arrêtés en gros à deux mètres de la ligne d'arrivée. C'est pour ça qu'hier, ils étaient contents de faire la fête avec nous pour voir ce lieu ouvert. Et les bénévoles, c'est pareil. En fait, là, je parle d'équipe salariale, mais il y a une période où chaque semaine, il y avait une réunion avec le bureau, toutes les deux semaines avec le CA, en disant voilà où on en est, qu'est-ce qu'on fait, comment on fait, comment on active les contacts, etc. Ces lieux incarnent aussi la vitalité associative de Ping dans ses diversités, dans ses publics et dans les partenaires et les personnes impliquées dans ces lieux-là. Parce que j'ai oublié de dire, Hyperlien, ce n'est pas que l'association Ping, c'est aussi le Human Lab de la page 44, qui travaille sur la question du handicap et Fab Lab, comment on utilise un Fab Lab pour améliorer les situations de vie des personnes porteuses de handicap. la maison du libre qui travaille sur le reconditionnement et la promotion des logiciels libres pour que ça puisse servir au plus grand nombre. Ces lieux-là incarnent aussi la philosophie de Ping, comment on le porte à plusieurs, comment on implique différents publics et acteurs dans ces lieux-là, comment ils s'emparent et détournent les usages aussi de ces lieux. J'ai un peu passé sous silence. Il y a certains chantiers qui ont été lancés par des bénévoles spécifiques que nous, on n'aurait pas forcément lancés en tant que salariés. et donc c'est chouette aussi de voir le projet croître, naître, puis après les bénévoles ils ont plus le temps donc ça décroît puis un jour il y a un autre pool de bénévoles qui revient qui dit mais c'est quoi cette machine dans le fond là? ça c'est une scène, ça te dit? ouais vas-y on se remet dessus et ça repart et puis ça s'arrête et finit, voilà. Mais ça c'est chouette c'est quand même la vie des lieux
Yaël Bah écoute merci beaucoup et justement ça permet peut-être de faire rien, je trouve que c'était assez intéressant ce détour parce que finalement donc Julien on a compris que c'était quelqu'un d'important dans dans le récit de Ping et dans l'histoire. En fait, c'est précisément à ce moment du passage dans ce nouveau lieu et du coup, j'allais dire aussi de ce moment un peu de crise compliquée avec ces questions de financement, ces retards et cet épuisement que tu as très bien décrit. En fait, il va décider de partir. Du coup, est-ce que vous pouvez un peu nous raconter ça? Et en plus, même là, de ce que tu as dit, au-delà de Julien, ce n'est pas que Julien, mais en fait, c'est carrément peut-être une équipe salariée qui part. Donc, est-ce que vous pouvez un peu nous raconter ça?
Meven C'est effectivement très lié au lieu. C'est aussi, je pense, lié en partie à la situation de post-pandémie. Mais pour peut-être revenir à la question de la gouvernance un peu plus spécifiquement, j'ai dit tout à l'heure qu'on avait eu un fonctionnement pendant assez longtemps avec deux strates, on va dire, des salariés qui décident de tout et un codev qui fait avancer un petit peu les sujets plus au quotidien. À la suite de la pandémie, on se fait accompagner sur notamment la question de la gouvernance. Et c'est à ce moment-là que notamment Julien prend la décision de nous annoncer qu'il va partir. Et du coup, c'est aussi un moment intéressant pour nous parce que c'est un moment où on se fait accompagner sur le sujet. Donc, en fait, on peut traiter directement le sujet et prendre le temps d'y réfléchir et on ne le fait pas dans l'urgence à l'arrache. Et du coup, on se pose très concrètement la question de comment on veut continuer à fonctionner ensemble, avec plus une focale sur le fonctionnement interne à l'équipe salariée que sur le fonctionnement entre ces deux échelles, on va dire, CA bureau et salarié. Et du coup, c'est un moment où on en profite pour revoir un petit peu cette histoire de codev, puisque en fait, les personnes qui le composent, de fait, vont partir. Et du coup, à se sortir du coup de confinement, c'est à ce moment-là qu'on crée la fameuse plancha, qui devient vraiment là, plus seulement une réunion où il y a tous les salariés, mais où on traite un peu tous les sujets, là, on se dit qu'il y a une réunion spécifique qui va traiter des questions de stratégie, de RH, de budget, et qu'on va le faire ensemble. Et on efface, en fait, un petit peu, dans un premier temps, ce double fonctionnement à strat qu'on pouvait avoir avec l'existence du codev.
Karl Est-ce que, peut-être, tu peux nous expliquer comment ça fonctionne, ces réunions plancha? Au sens, parce qu'on imagine qu'au-delà de la réunion, il y a des règles à l'intérieur qui décident de... Comment est-ce que ça se passe, en fait?
Meven Alors, en fait, toutes nos réunions fonctionnent plus ou moins sur le même modèle. On est des... des férus de documentation. Donc, le principe, en général, c'est qu'on a un pad pour chaque réunion dans lequel il y a un ordre du jour qui est l'ordre du jour de cette réunion qui est globalement assez fixe dans ces thématiques. Toutes les réunions ont un ordre du jour qui est spécifique. donc typiquement la plancha parle de RH elle parle de budget elle parle de partenariat elle parle d'un certain nombre d'autres sujets qui sont un peu stratégiques comme ça et dedans chacun des salariés en fait on a tous le lien du pad et on compose ensemble l'ordre du jour au fur et à mesure des sujets qui nous viennent et qui nous semblent être importants à traiter collectivement et donc le fonctionnement d'une réunion c'est qu'on reprend cet ordre du jour en projetant le pad, il y a toujours quelqu'un qui fait de la prise de notes et puis on traverse on échange en fait, chaque personne qui a mis un point le présente, on en discute quand il y a des décisions à prendre on se donne des modes de décision qui ont un peu varié au fur et à mesure de l'époque, enfin des différentes époques de ping mais globalement ça tourne autour de procédures liées au consentement en général et voilà un petit peu le modèle de comment fonctionnent les réunions et pour revenir à cette histoire on décide de supprimer le codev entre guillemets assez vite en fait on se rend compte du coup que ce qu'on disait avant en fait il y avait un travail un peu souterrain qu'on n'avait pas trop mesuré qui est tout un travail dont on parlait avant qui est le travail de Julien en fait qui était de parler à plein de gens tout le temps de plein de choses et qui est un truc qui est difficilement mesurable en fait. Et que si on n'a pas cette personne visible ou en tout cas ce truc dont les gens à l'extérieur de Ping interprètent que c'est lui qui décide, et bien en fait c'est compliqué. Et du coup à ce moment-là on se dit, ok on va essayer de trouver une manière de pallier à ça. Et c'est à ce moment-là qu'on crée ce qu'on appelle du coup la co-direction. Grégoire disait qu'il est le co-directeur avec une autre personne qui s'appelle Cécile. Donc cette co-direction, je laisserai la parole à Grégoire pour qu'il puisse nous expliquer un peu son sentiment et ce que ça veut dire pour lui. Mais globalement, au moment où on se dit qu'on va créer ça, l'idée, c'est qu'on ait du coup une personne ou un duo qui soit un peu identifié sur ces questions de stratégie, de partenariat pour l'extérieur, qu'on va continuer à les discuter collectivement parce que le fonctionnement de la structure doit être horizontal, mais qu'effectivement, on ne peut pas demander à nos interlocuteurs de connaître absolument tous les salariés de Ping et l'étendue de leurs prérogatives.
Grégoire Et donc, pour revenir un petit peu sur cette fonction de co-directeur, Déjà, elle n'est pas vieille parce qu'elle date du début de l'année, donc ça fait neuf mois qu'elle est en place. Et on n'est pas dans une co-direction au sens lien hiérarchique subordonné avec les autres membres de l'équipe et pas de rapport de management non plus. Je ne sais pas si c'est une particularité chez nous, mais les postes de salariés sont très autonomes avec les avantages et les inconvénients. Avantages, tu fais ce que tu veux. Inconvénients, tu fais ce que tu veux. Donc, le rôle de la co-direction n'était pas de dire aux gens, tu fais ça, tu fais ci. C'était à la limite de venir en appui quand une personne éprouve le besoin justement de venir en parler. Bah tiens, j'ai un doute, j'arrive pas à savoir, est-ce que je cadre bien mon projet? Est-ce qu'il faut que j'invite tel partenaire? Est-ce que tu penses que tu as une minimum? Et plutôt avoir un rôle ressource auprès de l'équipe quand la personne en ressent le besoin. Mais van parler en effet aussi d'un visage vers l'extérieur. Là, en effet, on est plutôt sur une bicéphalie vis-à-vis de l'extérieur. Mais je nuancerais dans le sens où chaque partenaire stratégique propre à un projet d'un salarié, c'est le salarié qui va le gérer. Très clairement, Meven va travailler en lien avec les écoles d'archi et de design. Ce n'est pas moi, en tant que co-directeur, qui va faire le rendez-vous. Il est bien maître quand même de ses relations et il connaît beaucoup mieux le sujet de son travail que moi. Par contre, un acteur extérieur qui n'a pas une porte d'entrée clairement identifiée sur un projet spécifique de ping, en effet, c'est Cécile et moi qui allons prendre le lien, qui va prendre la tâche. Relation institutionnelle-collectivité territoriale qui peut être aussi un peu vaste et variée, ça va être plutôt en effet Cécile et moi qui allons faire cette interface. En disant, nous on connaît l'intérieur de ping, on sait comment ça fonctionne, on sait vers qui, on peut réorienter en interne. Ok, c'est nous la porte d'entrée. Et on joue ce rôle aussi de SaaS dans certains cas. Des fois, on garde ce rôle d'interlocuteur privilégié. pour faciliter et fluidifier les échanges. Et d'autres fois, on réoriente directement vers le salarié concerné quand on sent qu'il n'y a pas besoin que ça passe par nous. Ça va rouler tranquille. C'est un partenariat de confiance. Il n'y a pas de risque pour les collègues. Il n'y a pas de loup masqué non plus derrière. Donc, on peut y aller travailler en confiance. Mais sinon, on est un peu ce visage extérieur, mais pas tant que ça. Enfin, extérieur que pour ceux qui ne connaissent pas la structure. C'est plutôt ça dans ce sens. C'est neuf dans le sens où ça se construit aussi et on peut ajuster en permanence. De toute façon, la gouvernance, ça ne peut pas être quelque chose de figé. Personnellement, je suis convaincu que ça ne peut pas être quelque chose de figé. Il faut tout le temps de littératie dans les modes de décision et les prises de décision. Donc, ça va peut-être encore évoluer. Donc là, on est en 2023. On tourne là-dessus. Revenez dans un an. On verra si c'est toujours pareil.
Speaker 5 Et je me permets une question parce qu'en fait, on a abordé le départ de votre fondateur, mais c'est toujours d'un point de vue très fonctionnel. vous n'avez pas du tout parlé de l'émotionnel. Or, quand même, en général, quand on a un fondateur qui parle, il y a quand même un truc émotionnel qui se joue, et identitaire aussi.
Grégoire Alors, je donne mon point de vue. C'était une surprise, en fait. Ça a été annoncé, en effet, ça a été travaillé suite à un travail sur la gouvernance, comme l'a dit Meven, mais la conclusion n'était pas qu'il fallait qu'il parte. Et donc, c'est un cheminement mental qu'il a fait, et donc, ça a un peu séché l'équipe. Enfin, en tout cas, moi, je l'ai perçu comme ça. donc grosse surprise, incompréhension mais pourquoi? Voyons le projet est quand même chouette, oui Hyperliens c'est un peu dur mais ça va être chouette et donc en fait très rapidement on commence à se poser la question, pourquoi est-ce que c'est notre relation qui est pas bonne est-ce que c'est la gouvernance qui tourne pas et en fait on discute avec lui et en fait ça devrait devenir un adage on sait quand on rentre à Ping mais on sait pas quand on le quitte hier c'était l'inauguration il y avait tous les anciens salariés de l'asso qui sont passés parce qu'en fait ils sont attachés aux valeurs, ils sont attachés au projet et donc oui ça nous a surpris oui ça nous a séché mais en même temps on comprenait les motivations intrinsèques de Julien. Il avait fondé l'asso, c'était un moment de sa vie, il voulait voir d'autres choses professionnelles il voulait tester d'autres milieux et on lui a dit bon bah c'est chiant ok mais on comprend et on accepte. Donc ce qui fait que ça a été surprenant les rôles étaient quand même bien répartis, on n'était pas non plus sur une gouvernance verticale mais on parlait du triptyque et en effet c'était vraiment un triptyque, on avait une personne, Julien vision lointaine, une personne qui structurait une personne qui assurait aussi la gestion administrative, en fait ce trinôme se complétait plutôt bien et donc quand Julien est parti on s'est dit ok, on va juste essayer de garder la relation institutionnelle les autres salariés avaient suffisamment travaillé avec Julien pour être passeur aussi des valeurs et de la vision du projet, de l'association et c'est pas comme si on enlevait la tête c'est plutôt comme si on enlevait une partie du visage de Ping que les gens de l'extérieur voyaient mais le lobe droit et le lobe gauche du cerveau ils étaient toujours fonctionnels donc voilà ça c'est un peu mon ressenti et à tel point qu'en fait on l'a pas remplacé dans les fiches de poste quand Julien est parti, on l'a pas remplacé On n'a pas dit, tiens, il faut qu'on recrute quelqu'un d'autre qui avait le rôle de Julien. Déjà parce que c'est impossible. On s'est dit, en 19 ans, il a fait sa fiche de poste. Enfin, en 18 ans, 17 ans, 17 ans, il a fait sa fiche de poste. Impossible de mettre un autre Julien. Et de toute façon, ça n'a pas de sens. Donc, ça a facilité aussi la passation. On s'est dit, de toute façon, on ne remplace pas Julien. Son poste est très particulier. Ses relations étaient très particulières aussi avec les élus, avec tout le milieu, l'écosystème nantais. parce qu'il l'avait travaillé depuis de longues années. Et personne n'aurait pu reprendre ça aussi bien que lui. Donc voilà, ça répond à moitié à ta question. Mais émotionnellement, ça s'est plutôt bien passé. Et on le voyait régulièrement aussi revenir dans les locaux. Il a mis quelques mois à enlever les derniers cartons sur son bureau. Il nous emprunte régulièrement nos consoles techniques pour la prise de son.
Yaël Et il n'est pas très loin maintenant.
Grégoire Non, il n'est pas très loin. En plus, il part très loin géographiquement et pas très loin professionnellement. Il travaille à ChatFM, une radio associative nantaise avec qui on a des liens aussi. Donc, il n'a pas rejeté en bloc le projet. Il est toujours, on le croise régulièrement. Ça, c'est fini de façon vraiment très agréable et sans qu'il y ait de sentiment de trahison non plus. En tout cas, de ma part. Donc, voilà. C'est que mon ressenti. Donc, je vais peut-être laisser mes veines partager le sien.
Meven Non, je pense qu'on a des ressentis très proches. En fait, il est parti. Oui, ça procure un certain nombre d'émotions. Aussi, un peu de tristesse parce qu'on partageait plein de choses. Ce n'est pas juste qu'il avait fondé la sauce. En fait, Ping, c'est une structure qui est très attachée à ses valeurs, dans laquelle on met beaucoup de nous aussi, individuellement. Chacun dans nos postes, une grosse partie du travail qu'on fait, je dirais, vient du dehors du travail. C'est nos idées, une partie de ce qui nous anime qui passe là-dedans. Et du coup, forcément, le fait que lui parte, c'était une petite partie qu'il reprenait aussi. Et peut-être que nous, en apportant d'autres bouts et puis aussi plein de choses qu'on partageait avec lui, on le continue d'une manière différente et je pense pas que ça ait ni transformé radicalement la structure ni été particulièrement un fait émotionnellement marquant pour tout le monde
Speaker 5 et peut-être pour compléter justement tu citais la question des valeurs tout à l'heure Grégoire tu parlais de la vision depuis qu'il est parti est-ce que vous avez l'impression que les valeurs ont évolué que la vision a un peu bougé est-ce que vous avez un peu changé vos activités ou est-ce qu'il y a vraiment eu une continuité est-ce qu'il y a eu un avant et un après Julien?
Meven C'est une très bonne question j'ai pas l'impression que ça ait tant que ça a bougé par contre peut-être que tout à l'heure Grégoire parlait de la désinvolture de Julien et de la manière avec laquelle il était capable d'arriver dans une réunion très institutionnelle avec un t-shirt fuck off Google et en étant très direct avec ses interlocuteurs. Après, c'est plus propre à nos tempéraments, mais on a beau parfois penser exactement la même chose, peut-être qu'on ne va pas le dire tout à fait de la même manière aux interlocuteurs qu'on a en face. Après, c'est plus des positionnements qui restent intimes et personnels et plus liés à nos personnalités que des gros changements sur le plan des valeurs ou de l'ADN de ce qu'on met dans la structure. Je ne sais pas ce que tu en penses.
Grégoire Je te rejoins totalement. Je pense qu'on a peut-être perdu un peu de légèreté, de grain de folie. Je me pose la question, mais c'était le température du lien aussi qui a amené ça. Et je ne sais pas, est-ce que c'est situationnel, parce qu'aussi, nouveau lieu, donc enjeu de représentation, visibilité politique, ancrage dans nos nouveaux quartiers, nouveaux partenariats, etc. Ou est-ce que c'était vraiment aussi le savoir-être de Julien qui, ouais, il te fait un schéma incompréhensible, ça le fait marrer, il insulte à demi-mot le financeur qui est dans la salle. Enfin, non pas à demi-midi, j'exagère. Mais en tout cas, il détourne les codes traditionnels de la relation avec le financeur. Et donc, je ne pense pas que le sens du projet est globalement... En fait, d'un point de vue projet, non. Je ne dirais pas qu'il y a un avant et un après. D'un point de vue légèreté et grande folie, peut-être. Mais est-ce que c'est dû à la personne ou à la situation? Impossible de savoir pour le moment.
Karl Et vous avez tous les deux plusieurs fois mentionné la vision lointaine qu'il portait. Et de ce point de vue-là, comment est-ce que... Parce que dans l'évolution de votre modèle organisationnel que vous nous avez présenté, vous nous avez surtout expliqué comment est-ce que vous gériez l'association au quotidien sans lui. Comment est-ce que vous avez géré cette question de vision lointaine? Comment est-ce que vous projetez l'association dans les futures années, maintenant que c'est plus lui qui le fait?
Grégoire En gros, il nous a contaminés. Il avait le virus du libre, du bidouillage. Et au début, tu rentres à ping, t'es curieux. Et au fur et à mesure, tu apprends de cette culture partagée, tu la fais tienne aussi, tu changes les cultures communes aussi en apportant ta personnalité. Et donc, t'es marotte aussi au sein du collectif. Et donc, finalement, cette vision-là, dans les valeurs, il y a une continuité. T'apprends à côté des autres et donc, tu fais tien certains des valeurs collectifs. Dis comme ça, ça fait bizarre. un gros truc un peu communiste, il n'y a pas de commissaire politique du tout, on a juste interdiction d'utiliser les GAFAM, sinon on brûle sur place, mais à part ça, on n'est pas vraiment là-dessus. Et donc finalement, sur la vision stratégique, pour moi il y a deux choses, il y a la vision des valeurs, où en effet il était moteur, mais il a réussi à contaminer tout le monde, et il y a la vision stratégique qui était là portée par le triptyque du Codev. Et finalement, la vision stratégique, elle a été conservée, elle a été transmise, on a des personnes qui sont en capacité de repérer, ok, si on fait telle action, il y aura telle conséquence, telle conséquence, il faut amener tel acteur à cet endroit-là, et donc on y va de cette manière-là. Ça va l'a conservé. Et la vision politique de vision de changement de société, elle est incarnée un peu par tout le monde, et on a quand même, de façon informelle, je suis heureux de te la prendre mes veines, mais tu as aussi un peu repris ce flambeau. Tu es un peu la personne qui va chercher les signaux faibles dans les écrits, qui va interpeller l'équipe en disant, j'ai lu un truc super chouette là-dessus, ça a l'air trop fou, il faut qu'on en parle. Et en fait, indirectement, sans avoir vraiment l'aura et l'héritage de Julien sur tes épaules, il y a un petit peu cette mission de veille, à mon avis, que tu peux incarner, mais qui est aussi plus partagée par l'équipe que ça a pu être auparavant, je pense.
Meven Quand je suis arrivé dans la structure, il y avait ce truc où effectivement, moi, je discutais beaucoup avec Julien parce qu'on avait beaucoup en commun aussi en termes d'idées, d'échanges intellectuels. Mais qu'on est d'une génération assez éloignée, mine de rien. Et qu'en fait, il avait vécu tout un tas de choses que nous n'avons pas vécues. La plupart des salariés, même encore actuellement dans la structure. et ça nous a beaucoup nourris et une des choses sur lesquelles qui est une des choses des premières choses en fait et activités que j'ai essayé d'amener dans la structure c'est qu'on fasse collectivement de la veille c'était pas forcément lié ou pas à quelque chose que j'aurais perçu du départ de Julien parce que c'était bien avant et parce que ça s'est pas posé comme ça mais il se trouve que Effectivement, c'est une question prospective, d'essayer d'aller voir un peu ce qui va se passer loin. Moi, c'est des choses qui me nourrissent et qui font partie de mes pratiques au quotidien. Et qu'on faisait un peu tous de manière un peu informelle et sur lesquelles j'ai aussi essayé d'apporter de la méthode. Et que du coup, on a essayé de conserver alors qu'on organise tous plus ou moins à une échelle différente. Mais c'est vrai que je pense que c'est une activité qui fait partie du fond un peu commun des différents thèmes dont on traite chacun des salariés à Ping et quelque chose d'important.
Yaël Merci beaucoup. Je pense qu'on peut passer à la question d'experts.
Karl Et aujourd'hui, notre expert est Margaux Langlois. Rebonjour Margaux.
Margaux Rebonjour.
Karl Tu es docteur en gestion, comme on le disait tout à l'heure, et enseignante chercheuse à Paris School of Business. Tu étais notamment spécialiste des modèles organisationnels ouverts. Et en fait, on voulait revenir avec toi précisément sur les façons d'organiser une association pour faire en sorte de faciliter les transitions de gouvernance, les changements de personnes. Et donc, peut-être qu'on peut commencer avec une question assez simple. Est-ce que le modèle de Ping fait écho à des choses, l'expérience de Ping a fait écho à des choses que toi, tu as déjà pu voir dans tes travaux de recherche? Est-ce que tu as suivi ou vu des départs de fondateurs d'associations? Comment est-ce que ça s'est passé dans ces cas-là? Est-ce que dans tes recherches, ça fait écho?
Speaker 5 Oui, complètement. Alors peut-être, ça me semblerait important qu'on revienne un peu sur la définition de ce que c'est en fait le rôle de fondateur, parce qu'il y a quand même eu pas mal de recherches là-dessus. Alors c'est vrai que c'est plus sur le fondateur de façon générale et sur les entreprises, mais il y a quand même pas mal de choses qui sont quand même communes entre les assos et les entreprises sur ce rôle spécifique de fondateur. On en a parlé, ça peut être un fondateur, une fondatrice, ou un groupe de fondateurs et de fondatrices. C'est quelque chose qui n'est pas défini par la loi, comme ça peut être le cas par d'autres rôles, par exemple la présidence, la propriété. Donc ça veut dire qu'on n'a pas d'autorité structurelle ou de rémunération particulière parce qu'on est fondateur ou fondatrice. On en a parlé, c'est un rôle d'architecte initial de l'organisation. Ce qui veut dire aussi que cette qualité d'être fondateur, fondatrice, elle est autre proclamée ou alors elle est reconnue par l'extérieur. Et donc, effectivement, c'est davantage une question de légitimité, notamment auprès du collectif qu'on a commencé à fonder avec son association. Alors, le rôle de fondateur, normalement, il est censé s'arrêter quand l'organisation devient réellement opérationnelle. Mais en fait, ce qu'on s'aperçoit dans la recherche, c'est que son influence, elle peut persister. Alors notamment quand il ou elle assume d'autres fonctions dans l'organisation avant ou après le début des opérations, c'est assez fréquent finalement, par exemple dans une asso, qu'un fondateur devienne président ou devienne effectivement directeur général. Et effectivement, en général, on reste quand même sur des échelons assez supérieurs de l'organisation. Ou ça peut être aussi un administrateur, mais bon, voilà, il y a quand même généralement toujours un lien. Et justement, sur cette question du fait que ce soit autoproclamé, c'est marrant parce que moi, dans ma thèse, j'ai notamment étudié Ouishare. Et dans Ouishare, il y a eu pas mal de débats sur deux personnes qui se sont en fait autodésignées comme fondateurs, fondatrices. Et en fait, au sein de la communauté, ça a vraiment posé problème et des conflits parce que le titre n'était pas considéré comme légitime. ils n'avaient pas créé l'association. Ils ont contribué à sa croissance parce qu'ils ont pris en charge des gros projets. Ils ont collaboré aussi beaucoup avec des personnes de la sphère politique. Et ils avaient aussi un rôle majeur dans les relations de l'association avec les médias. Et je pense que c'est aussi pour ça qu'ils se sont finalement attribués ce rôle. Parce qu'on en a un petit peu parlé, mais c'est vrai que sur l'influence des fondateurs et des fondatrices, ce qu'on voit quand même en recherche, c'est que de façon générale, le fondateur ou la fondatrice jouit d'une image particulière, peut-être plus légitime, notamment auprès des parties prenantes externes. Donc c'est vrai que ça peut être aussi quelqu'un qui va plus facilement aller trouver de l'argent auprès d'investisseurs. C'est le visage, généralement, de l'organisation. Comme vous l'avez expliqué, finalement, sur Julie, c'était ça aussi. Donc effectivement, ça va être vraiment le point de référence, surtout parce que c'est aussi souvent quelqu'un qui va être visible. Et puis, d'autres éléments aussi importants sur le fondateur, c'est qu'en général, la personne qui fonde une association, une organisation en général, il va un peu imprimer sa marque. Il va définir comment elle va se structurer au départ, quelle est sa vision, justement. C'est lui aussi ou elle qui va insuffler la culture d'entreprise ou culture d'association. Les valeurs, on en a parlé. Donc effectivement, il y a un rôle aussi identitaire qui est super fort de la part du fondateur. Et puis du côté du fondateur aussi, on a quand même en général un engagement psychologique assez fort. T'en parlais, Karl, dans le début de ton intro, le côté c'est mon bébé, mon engagement, la volonté qu'il y ait finalement une continuation. Et clairement, c'est lié à l'ego et à l'autoréalisation des fondateurs. D'où aussi le fait que parfois, certains ont du mal à partir de l'organisation. Pour donner aussi un exemple sur ce truc d'image, moi, je pensais à Jimmy Wells, le fondateur de Wikipédia. Il est toujours au board aujourd'hui. Il participe aux réunions de board, mais ça s'arrête là. Par contre, s'il y a quelques temps, vous étiez sur Wikipédia, vous avez pu voir qu'il y avait la campagne de dons et que c'était écrit « Jimmy Wells vous demande de l'aide ». Donc voilà, il est encore finalement cité dans la levée de fonds. C'est encore le visage de Wikipédia, alors que finalement, il a un rôle très minime depuis très longtemps. Et puis, vous évoquiez effectivement le fait que finalement, tôt ou tard, chaque membre de l'organisation va en partir. C'est le cas aussi des fondateurs. Tôt ou tard, le fondateur ou la fondatrice quitte l'organisation, volontairement ou non. Donc effectivement, c'est un vrai sujet. Alors, par rapport aux recherches que j'ai faites, et notamment à mon travail de thèse, moi j'ai eu effectivement deux cas d'organisation où j'ai pu toucher à cette question du départ des fondateurs, soit l'avoir directement, soit que ce soit quand même un gros élément dans la vie de l'organisation. Mais là où c'est marrant par rapport à ce que moi j'ai pu observer, c'est que moi j'ai vu que des cas où les fondateurs ont été poussés vers la sortie par les membres. donc c'est un peu particulier effectivement aussi pour donner un peu de contexte les deux assos que j'ai étudiés Ouishare et puis l'autre qui est anonymisé dans ma thèse qui s'appelle M21S ce sont des organisations ouvertes ça colle aussi pas mal avec Ping qui visiblement résonne avec les cultures du libre et de l'open source donc c'est à dire que dans ces assos là on va à fond valoriser tout ce qui est participation transparence, on va donner une forte autonomie aux membres et effectivement l'autocratie c'est censé pas être très compatible avec ces modèles organisationnels ouverts donc peut-être pour raconter un petit peu ce que j'ai vu parce que je pense que c'est ce qui nous intéresse, donc en fait au sein de M21S, j'y ai pas assisté mais on m'a raconté, le fondateur prenait beaucoup de décisions tout seul, il était aussi le président et en fait lors du NAG, les membres ont demandé à changer de modèle organisationnel pour mieux incarner leurs valeurs. Alors en particulier cet asso-là, historiquement c'était l'asso qui portait vraiment tout ce qui était autour de l'entreprise libérée. Et effectivement l'idée c'était un peu d'incarner ce qu'ils portaient eux-mêmes. Et ce n'était pas le cas avec une personne qui était dans un fonctionnement très autocratique. Donc ils ont voulu changer de modèle, aller sur des modes de décision plus participatifs. Donc, ils ont mis en place un modèle assez proche de la sociocratie. Il n'a pas été réélu président. Et finalement, en fait, il est parti. Soyons honnêtes, il est un peu parti aussi par la forte des choses. Mais je pense aussi qu'émotionnellement, dans ces moments-là, ça doit être frustrant de se faire sortir et de ne pas reconnaître tout le travail qu'on a fait. Et après son départ et la mise en place du nouveau modèle organisationnel, ça a été un peu compliqué dans l'asso qui a enchaîné les crises. Et d'ailleurs, en fait, ce fondateur et président en est venu être regretté par certains des membres, parce qu'il prenait beaucoup de décisions, certes seul, mais il était aussi très actif et il organisait plein d'événements dans l'association. Et en fait, quand il est parti aussi avec le changement de modèle, où les choses ont été beaucoup plus distribuées, l'association a eu clairement un gros creux au niveau de ses activités, à la fois les activités qui étaient tournées vers l'extérieur et les activités internes. Même les réunions internes étaient beaucoup plus limitées. En revanche, ce fondateur est parti en dessous un petit cadeau empoisonné parce qu'il semblerait qu'il se serait peut-être un peu servi dans les caisses sans avoir remboursé. Mais ce qui est quand même étonnant et comme quoi le fondateur a quand même une image particulière auprès des membres, c'est que, en fait, et aussi par rapport aux valeurs de l'organisation, en fait, comme il avait donné vie à ce projet, les membres qui étaient là, qu'il avait vraiment connu, les membres les plus anciens poussaient à pardonner et à ne pas sanctionner ce comportement alors moi j'avoue que ça a été quelque chose qui m'a surpris, soyons même choquée en fait parce qu'on parlait là de comportement qui était même sanctionné par la loi en fait et malgré ça c'est vrai qu'il y avait deux visions qui s'opposaient ceux qui étaient peut-être un peu plus récents qu'il n'avait pas connus et qui disaient qu'il fallait peut-être faire quelque chose. Et les membres plus anciens qui disaient « Non, il faut le pardonner. » Mais bon, finalement, ce qui comptait quand même plus dans cet asso-là, c'était qu'on colle aux valeurs de l'association. Donc finalement, même s'il avait un peu pris dans les caisses, c'était pas trop grave parce que ce qui était grave, c'est qu'avant, il n'était pas participatif, pas transparent, etc. Alors, au sein de Ouishare, historiquement, il y avait quatre fondateurs, fondatrices reconnus. Et en fait, ce sont les quatre personnes qui ont contribué à créer le statut juridique de l'association Ouishare et qui sont ensuite restées dedans pour développer les activités commerciales. Par contre, ce qui est aussi un peu marrant, Ouishare, c'est que je n'y étais pas à la création. Ouishare a été créée en 2012, mais au-delà de mes observations, j'ai fait ce qu'on appelle de la nétnographie. C'est-à-dire que j'ai été fouiller tous les posts Facebook des groupes Ouishare privés, tous les posts Lumio, les messages sur Slack, etc. Et donc, j'ai pu lire un peu tout ce qui se passait, les commentaires de Google Docs aussi, c'est magnifique. Et donc, j'ai pu voir qu'il y avait finalement d'autres gens dont on ne m'avait jamais parlé, qui avaient aussi participé à la création de Ouishare. C'est un groupe qui était peut-être de dix personnes, dont on n'en retient finalement que quatre. Et donc, ils ont participé à la création de Ouishare, à l'écriture des statuts, avant que leur gars existe formellement. Mais en fait, par les membres, ils ne sont pas connus. On ne redonne pas leur nom dans l'histoire de l'organisation. Alors que ça pourrait être aussi des membres fondateurs, fondatrices. Parmi ces quatre fondateurs et fondatrices, l'une est partie vers 2014-2015, il me semble, pour prendre un job de direction d'asso. Donc relativement rapidement. Un second est parti plutôt vers 2016 pour créer un projet entrepreneurial. Le troisième, il est parti en 2018, début 2018, parce qu'il avait créé une entreprise avec le quatrième.
Karl Donc, il n'en reste plus?
Speaker 5 Eh bien non, il n'en reste plus. Alors après, ça s'est fait petit à petit, avec chaque fondateur qui partait petit à petit. Mais finalement, le dernier qui est resté, on va l'appeler A. A, c'était quand même vraiment le visage de Ouishare. En fait, si on devait retenir un fondateur, ça serait lui. Parce que c'est lui qui était à l'origine du projet, grâce à un blog qu'il avait créé pendant ses études. C'est lui qui avait lancé les apéros pour discuter économie collaborative avant que l'asso existe. Donc clairement, s'il devait y avoir une personne qu'on retenait, c'était lui. Et puis vous parliez tout à l'heure du rôle du cervaau. C'était lui le cerveau de Ouishare. C'était lui qui avait la vision, etc. Je me rappelle des fois de certains postes où ça me semblait presque mis en scène. Mais clairement, il avait un leadership particulier où il cherchait tout le temps, effectivement, à essayer d'avoir de la prospective, de voir plus loin, de voir plus grand aussi. Parce que c'était quelqu'un aussi qui est ambitieux. Donc, il avait vraiment une influence particulière sur la communauté. Par contre, du coup, il a aussi toujours divisé. Il était très présent. Donc, vraiment, dans ses prises de parole, il se positionnait un peu comme un leader inspirant. Mais en fait, le truc, c'est qu'aussi, il décidait beaucoup avec des petits groupes restreints de personnes qui ont changé selon les moments de Ouishare, les moments de vie de l'organisation. Et aussi, il a beaucoup pris la lumière. C'était aussi le visage de Ouishare. Donc, quand il y avait des opportunités de prise de parole, des projets avec des politiques ou des gens importants, il y était beaucoup. Des passages télé, c'était aussi beaucoup lui qui y avait. Donc, effectivement, il y avait parfois aussi de la jalousie. Et il avait dans la communauté autant ses fans que ses détracteuristes. qui lui reprochait notamment que son comportement ne match pas toujours avec les valeurs ouvertes de Ouishare, justement de transparence, de participation, etc. Et donc moi, quand j'ai démarré mes observations en 2018, c'était le seul fondateur qui restait dans un rôle opérationnel au sein de Ouishare parce qu'il participait à l'organe de décision qui pilotait Ouishare à l'époque. Alors eux, ce n'était pas le codev, c'était le copil. Donc c'était un groupe restreint de personnes qui avaient été initiés au départ informellement et ensuite qui a été mandaté par la communauté pour piloter le budget. Et puis rapidement, ce groupe est aussi venu à se poser des questions sur la stratégie, l'organisation de Ouishare. Les autres membres du Copil, ils gagnaient toute leur vie grâce à Ouishare. Et en fait, c'est important parce que dans cette communauté, il y a une logique qui s'appelle la doocratie. C'est la logique qui prévaut. En gros, l'idée, c'est que le pouvoir est concédé, surtout quand on fait des choses au sein de l'organisation. Et en particulier, on a un peu plus de légitimité quand même quand on gère des gros projets, gros projets au sens financier, ou qu'on signe des deals commerciaux. Alors, ce n'était plus le cas de A depuis quelques temps, mais il avait contribué à ramener les deux gros projets qui ont vraiment permis à Ouishare, dans sa période un peu dorée, de prospérer. Donc là, on a ce fameux copil. a travaillé dans son entreprise qu'il a fondée avec l'autre fondateur. Il est encore à Ouishare parce qu'il vient à ses réunions de copie, discuter stratégie, budget, etc. Mais comme je vous ai dit, d'abord création informelle, ensuite il a été mandaté. Mais pour que les membres de Ouishare acceptent de mandater ce petit groupe, la communauté avait demandé à ce qu'il y ait une rotation des membres. Et à un moment donné, c'était un moment où il fallait avoir une rotation et à proposer de partir. alors il me semble que c'est parce qu'il y avait des personnes qui devaient revenir de congé mat et donc A a proposé de partir et ça a été accepté par les autres membres du copil mais A il s'est un peu ensuite tendu et l'impression générale que ça a donné dans les conversations informelles qu'on a pu avoir par la suite ou quand on a débriefé après en off c'est qu'on a tous eu un peu l'impression qu'il aurait voulu être retenu mais sauf qu'en fait la réalité c'est qu'il était quand même arrivé à un point où il était plus si légitime que ça dans l'asso effectivement il ne gagnait plus sa vie il ne faisait plus directement des choses pour l'association pour faire gagner de l'argent à l'association et puis aussi même humainement il était moins apprécié dans la communauté il avait un peu cette image où les gens l'appréciaient enfin pas l'appréciaient mais l'admirer il avait un peu ce truc d'admiration parce qu'aussi c'était le fondateur mais oui il y avait des choses dans les comportements qu'il n'y allait pas forcément et aussi ce qui s'est passé c'est qu'il a essayé de pousser une vision stratégique de Ouishare qui ne convenait pas du tout notamment aux autres membres du COPIL puis il y avait aussi des questions de conflits d'intérêts par rapport à sa nouvelle boîte et à Ouishare un ensemble en vrai de conflits de valeurs finalement et c'est là où ça revient aux questions que j'ai posées tout à l'heure sur l'identité parce que clairement entre le fondateur et ce qu'il insuffle au niveau identitaire sur l'organisation c'est important dans ces communautés ouvertes très souple, comme vous en avez parlé aussi tout à l'heure, c'est vrai que finalement, la communauté peut évoluer. On va rester attaché à des valeurs. Et effectivement, si le fondateur ne, finalement, n'incarne plus ces valeurs, ça pose vraiment un vrai problème. Et là, c'est un peu ce qui s'est passé. Et en fait, une fois qu'il est parti, rapidement, il y a une sorte quand même de soulagement. parce que je pense qu'il n'avait plus vraiment sa place dans le groupe. Et effectivement, typiquement, il y avait des trucs en off, mais un peu des running gags sur certains de ses comportements, notamment parce qu'il avait une réputation de séducteur, par exemple. Et dans ce type de communauté, clairement, l'informel se mêle très fortement aux relations de travail, encore plus que dans une boîte classique. Donc forcément, il y avait un peu tout ça qui s'entremêlait. donc en somme en fait dans Ouishare les départs volontaires des fondateurs se sont bien passés des fondatrices parce qu'ils se sont petit à petit désengagés une question qui revenait aussi souvent on en a parlé tout à l'heure mais c'est à quel moment on quitte vraiment l'organisation par contre dans les deux assos quand même les fondateurs qui ont été exclus par les autres membres l'ont probablement eux mal vécu mais au final pas pour les membres c'est pour ça aussi que je posais la question de l'attachement émotionnel ça a été assez fluide en tout cas au premier abord alors après oui sur la question de la légèreté et du grain de folie oui le départ de A ça a aussi peut-être posé des questions sur ces trucs là mais le fondateur de M21RS aussi c'est vrai qu'on sent qu'il portait un truc plus ambitieux et qu'il allait un peu plus loin que les membres qui ont repris ou alors qu'il avait du mal aussi à se mettre d'accord sur ce qu'ils avaient envie de porter aussi peut-être parce que c'était un groupe et que c'est compliqué de réussir vraiment à faire ça en groupe mais c'est vrai que c'est quelque chose que j'ai pu ressentir aussi et à nouveau qui est de l'ordre de la vision mais aussi qui est de l'ordre de l'identité du projet associatif dont vous parliez donc il y a vraiment un rôle fort là-dessus sur le fondateur et les départs peuvent avoir une incidence là-dessus
Karl Et alors justement est-ce que tu aurais des conseils de modèle organisationnel est-ce que tu le disais à l'instant est-ce qu'il faut qu'il y ait une autre personne très charismatique qui prenne la suite d'un fondateur ou au contraire il ne faut pas du tout aller vers ça si on veut tendre vers un modèle organisationnel ouvert, quels seraient tes conseils?
Speaker 5 Alors effectivement ça dépend ce qu'on a envie de faire est-ce qu'on a envie d'être plus démocratique, plus ouvert ou est-ce qu'on veut rester sur un truc hyper autocratique? Mais je pense qu'en fait de prendre la suite avec une autre personne charismatique c'est hyper compliqué déjà parce qu'en fait en général ce type de personnalité ils vont créer leur propre truc Donc, en fait, à la limite, ce qui se passera, ce sera un spin-off. Un spin-off avec une partie des gens qui vont suivre machin parce qu'ils aiment bien, que c'était un peu différent de... Voilà, ça ne serait pas Ouishare, ça serait... Je n'en sais rien.
Karl Oui, don't share.
Speaker 5 Nous partageons. Ou partageons. Voilà, partageons, c'est le nom que j'ai donné à Ouishare dans le cas que je fais travailler à mes étudiants. Donc, voilà, ça pourrait se passer comme ça. D'ailleurs, il y a eu des spin-offs de Ouishare avec des gens qui sont partis, typiquement aussi parce que Ouishare était une communauté internationale. Donc typiquement, je pense aux spin-offs un peu de communauté locale. Voilà, il y a eu des choses. Donc effectivement, je ne suis pas sûre que la personne charismatique soit le meilleur truc parce que finalement, là aussi, ce qui fait, je pense que dans tous ces cas-là, que ce soit à Ping ou finalement à Ouishare ou à MMTRS, ce qui fait que ça s'est relativement bien passé. En tout cas, ça n'a pas été émotionnellement douloureux. C'est ce que je veux dire par ça s'est bien passé. C'est qu'émotionnellement, ça n'a pas été une grosse rupture. C'est que finalement, le leadership tournant, c'est quelque chose qui est assez habituel. Donc, ce sont des organisations qui sont fluides, malléables par rapport à des orgas plus traditionnels et potentiellement aussi un peu moins statutaires. Parce que même si dans l'asso, il y a des statuts qui sont censés... On sait que, de façon générale, dans les asso, on n'est pas toujours hyper carrés là-dessus. c'est le principe aussi, c'est tous les débats autour de la professionnalisation des associations à partir du moment où ça devient carré, en général ça perd un peu de son charme après je pense que ça dépend aussi de la manière dont le rôle de fondateur est lié avec celui de président et aussi du rôle qu'on a donné au président de l'asso et à nouveau là on joint à cette question du statut parce que justement pour revenir à cette question du statut, j'avais étudié il y a quelques années des entreprises libérées justement ici à Nantes je crois qu'il y a mais en fait oui il y a un vrai terreau à Nantes sur ce genre de truc je ne sais pas ce que vous avez dans la culture nantes-bretonne il y a un truc
Karl on va explorer ça
Speaker 5 mais j'ai eu notamment des nouvelles d'une de ces entreprises qui avait commencé sa transformation en entreprise libérée en 2015 et en fait donc moi la personne avec qui j'ai été en contact c'est le directeur et il me disait aux dernières nouvelles qu'ils envisageaient de changer de statut pour devenir une coopérative et vraiment statutairement déléguer ce pouvoir de décision parce que comme il restait légalement aussi le dirigeant même s'il avait vraiment lui pour le coup et c'est pas forcément commun la volonté de partager les responsabilités avec ses équipes, il avait l'impression quand même que son statut à la fois de fondateur et de dirigeant crée finalement, c'est un vrai frein yeux de son équipe pour être capable de s'en saisir. Et puis aussi, il y a quand même quelque chose qui est lié à la culture plus démocratique aussi des assos versus les entreprises, un modèle légal qui est pensé aussi comme plus démocratique, avec quand même de toute façon une présidence qui est censée avoir un minimum de rotation. Le fait qu'on puisse être éjecté aussi par les membres versus on va se faire éjecter par des actionnaires, c'est quand même pas la même chose. Donc le risque viendrait peut-être plutôt de se faire éjecter ici par des administrateurs qui n'ont pas nécessairement les mêmes attentes que les salariés. Ça, c'est pareil au fond dans les deux cas. Mais en général, il y a quand même au moins un match de valeur dans les assos. Et puis, l'autre point, c'est effectivement... Oui, culture et leadership fluides vont faciliter ces transitions parce que ça fait partie aussi de notre identité organisationnelle. Mais le comportement du fondateur ou des fondateurs IS, et la manière dont ils partent, c'est aussi des choses qui sont assez cruciales dans la façon dont les choses vont se dérouler par la suite. Déjà, est-ce que c'est volontaire ou non? Effectivement, parce que dans ce cas-là, ça va être plus ou moins douloureux. Est-ce que c'est préparé? Parce que concrètement, vous, ça a été préparé. Et au final, à Ouishare, c'est ce qui s'est passé. Ça s'est à chaque fois fait petit à petit. Est-ce que c'est brutal? Donc, autre question. Est-ce que la personne s'accroche? alors qu'on ne veut plus d'elle. Ça arrive aussi. Et dans ces moments-là, ça va être douloureux. Ça va être douloureux autant pour la personne qui est en train de se faire jeter qu'aura fondé l'asso et qu'aura effectivement un goût amer dans la bouche que pour les membres qui ont envie de développer autre chose. Donc effectivement, et à nouveau, je pense qu'effectivement, les modèles ouverts, en tout cas où on valorise vraiment l'autonomie, la participation, la transparence, ça aide là-dessus parce que finalement, même si on a un visage, on a quand même quelque chose d'un peu plus distribué, d'un peu plus partagé, ne serait-ce qu'en fait des compétences aussi. Typiquement, quand tu disais tout à l'heure, Grégoire, oui, il nous a passé un peu sa vision, Julien, moi, je crois aussi peut-être qu'il a contribué à vous faire monter en compétences sur ce genre de sujet-là.
Karl Et alors, pour conclure, finalement, est-ce que, de ton point de vue, les modèles ouverts, les modèles décentralisés, holacratiques, certains disent, sont plus résilients face à ces départs de fondateurs? J'ai l'impression que ce que tu dis, c'est oui. Mais est-ce que c'est bien ça?
Speaker 5 Alors, ils sont plus résilients, mais à nouveau, ça dépend aussi de comment ça se passe. Et à nouveau, de la personnalité du fondateur, parce que la personnalité du fondateur est quand même énormément mise dans l'identité. C'est ce que vous disiez aussi tout à l'heure, on met beaucoup de nous dans ces assos. Donc, il y a ça aussi qui compte. Mais clairement, ce qu'on peut retenir aussi, je pense, de tous ces récits. Et d'ailleurs, ça m'amènera peut-être à une question pour vos invités après. Mais finalement, en fait, ce qui est important de dire, c'est qu'après le départ, l'influence des fondateurs continue. Il y a un vrai héritage organisationnel qui sont transmis par ces leaders, qui va avoir un impact important sur la façon dont évolue l'organisation. Je vous ai aussi mes questions tout à l'heure sur les valeurs, la culture de l'organisation. De même, effectivement, sur son identité, ça peut aussi clairement contribuer à ce qui rend... façonner ce qui rend aussi l'organisation spécifique, distinctive, ce visage-là. Tout à l'heure, vous avez vu aussi le truc de, il vient dans une réunion avec son t-shirt de Google. C'est bête, mais en fait, c'est un élément qui permet aussi de vous identifier. Ah ouais, c'était qui le gars l'autre fois? C'était le gars de Ping. Ah ouais, il était cool. Je vais revenir lui parler. Et l'autre point, et en fait, t'en as un peu parlé tout à l'heure, Grégoire, je m'ai l'été notée, t'avais parlé des récits cachés, des récits glorieux. Et effectivement, il y a tout le passé mythifié des organisations, tous ces mythes qui sont quand même très liés aux fondateurs. Et c'est vrai qu'il y a plein d'histoires comme ça qu'on entend. Et puis qu'on va peut-être parfois aussi réentendre de la part de plein de gens différents. Et ça, ça fonde aussi l'identité d'une organisation. En fait, ce qui se passe souvent, c'est que lors d'un départ, on va avoir une modification de l'identité de l'organisation. D'où ma question sur les valeurs. Et aussi, je pense que la différence avec les associations, c'est que par rapport à des entreprises où, en fait, on va... Soyons honnêtes, on peut mettre des valeurs. En général, la valeur première, c'est... Profit, profit. Voilà. Tout à fait. C'est vrai que quand on crée une association de base, on crée quand même quelque chose avec des valeurs qui sont différentes et qu'on veut incarner. Parce que même si on peut faire des associations à but lucratif, là, on parle aussi particulièrement des assos à but non lucratif. on a vraiment envie d'incarner un truc. Donc ça veut dire que les gens qui sont là, de base, il y a un fit avec ces valeurs-là. Et du coup, normalement, on est un peu censé les porter. Même si avec le temps, ça peut être amené à évoluer. Mais justement, c'est aussi peut-être plus fluide. Et justement, là où ça va jouer, c'est qu'il y a aussi une question autour de l'identification des membres de l'association. Et donc, le départ peut être plus ou moins aussi douloureux selon le comportement du fondateur, parce que ça va aussi jouer sur la façon dont s'identifient eux-mêmes les membres à l'organisation. et puis voilà aussi ce qu'on peut voir des fois c'est qu'on peut avoir des tensions qui vont se fonder sur la manière dont le fantôme ça a vraiment été conceptualisé, on parle vraiment des fantômes, continue de hanter finalement l'organisation et l'identité, notamment par rapport à la façon dont ce fantôme et ce fondateur va être considéré par les membres positivement ou non et en fait généralement c'est vrai qu'on peut avoir des périodes de tensions avec ce fantôme là, en particulier je pense que c'était très vrai avec A qui était assez clivant comme personnage Là, ça n'avait pas l'air d'être le cas de Julien, mais sur un personnage comme A, qui était très clivant, on avait des mythes, des mythes qu'on lui reconnaissait, mais des mythes positifs, et des histoires super moches. Et donc, justement, ça m'amène à ça. Est-ce que vous avez des mythes autour du fondateur à Ping? Une histoire qui se raconte tout le temps, de salarié en salarié. On en a toujours des histoires comme ça dans les organisations. Et souvent, on remarque quand même que c'est très souvent autour des fondateurs. Je vais me demander à être recrutée pour poser des questions.
Yaël Et t'es la bienvenue.
Meven Ça me fait penser à deux choses. Pas forcément des histoires spécifiquement liées à Julien, mais nous, on a une pratique de la documentation beaucoup, comme je disais avant. Et du coup, on documente beaucoup de choses, y compris des blagues ou des moments de vie. Et du coup, on les conserve. Et donc, notamment, il y a une affiche derrière qui est tombée, mais qui est un extrait de ses moments de vie. On va jusqu'à afficher nos propres phrases dans les lieux. Là, c'est marqué, tu sais installer un ordinateur, bon, tu sais sanger une couche. Ça, c'est quelqu'un un jour qui l'a dit. Je ne saurais même pas dire qui, mais c'est un membre de la structure. On conserve un peu ces petits bouts de sédimentation des phrases de nos collègues. Et pour ce qui est du fantôme de Julien, entre guillemets, je n'ai pas l'impression qu'il y ait des récits particulièrement mythiques, positifs ou négatifs. Par contre, effectivement, moi j'ai l'impression qu'à certains moments, on peut aussi avoir envie de se raccrocher à cette figure. Quand on se pose des questions, on se demande qu'est-ce qu'il aurait fait à ce moment-là? comment il aurait abordé cette problématique-là. Et peut-être notamment spécifiquement sur le fait que nous, on soit une association qui revendique aussi un certain héritage contre-culturel. Il y a des moments où ce caractère transgressif que lui avait, issu d'une histoire qu'on n'a pas vécue, nous, on ne peut pas forcément le porter de la même manière. Et en même temps, peut-être qu'on n'a pas la même mesure de ce qui est transgressif ou pas en fonction de notre personnalité. C'est un peu ce que je disais tout à l'heure, mais c'est aussi des questions de se dire est-ce qu'on peut porter ça collectivement au nom de l'association ou est-ce que c'est un peu trop vis-à-vis de projets qu'on porte qui sont des projets d'éducation populaire, qui ont un ancrage pour l'émancipation et qui sont politiquement forts.
Grégoire Je me suis rappelé un tout petit truc, mais c'est une micro-anecdote, donc je ne sais pas si c'est si pertinent que ça. Mais le coup, justement, on invite Ping à une réunion interministérielle avec l'ancêtre de l'ANCT, l'ancêtre de l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires, pour lancer un grand rendez-vous de toute la médiation numérique. Et ça serait exceptionnel. C'est la première fois qu'on le ferait porté par l'État. mais par contre on sait pas trop comment on sait pas trop quand et là il pose la question mais qui souhaite l'organiser donc t'as tout le monde dans la salle ça c'est le récit je ne l'y étais pas tout le monde dans la salle se regarde en même temps je sais pas ce que c'est je sais pas comment ça fonctionne ça va être un bazar et là t'as Julien qui ouais carrément je suis chaud carrément ping on est partant et ce qui fait qu'il revient après à ping en disant bon alors on a trois mois pour organiser un événement national avec la venue d'un ministre, des équipes de documentation un peu partout et sur trois lieux différents. Ça vous va? Là, t'as tous les collègues. Non mais qu'est-ce que tu nous as foutu là? Donc, mis à part ce petit récit de finalement, il impulse une vision et il prend une décision où il n'a pas le temps de consulter collectif parce qu'il faut agir rapidement, c'est plutôt sur ce genre de posture où il peut y avoir deux, trois récits qui sortent. Et je me permets juste d'avoir le micro. En fait, je pense qu'il y a aussi une posture qu'on n'a pas évoquée sur Julien, c'est que je crois qu'il ne voulait pas être fondateur. Je crois qu'en fait, il ne voulait pas être la personne sous le spot lumineux et qu'il reproduisait un peu ce que fait Framasoft en mode desframasoftisons. À force d'être dans la culture libre, il ne voulait pas cristalliser l'attention et il ne voulait pas incarner uniquement seul le projet. Et que c'est aussi cette posture de... En fait, pour l'embêter, moi je l'appelais le directeur artistique de Ping. Mais vraiment pour l'embêter parce qu'il n'était pas directeur et il n'était pas spécialement artistique non plus. Il faisait des magnifiques schémas. Je pense qu'il y avait aussi ça dans sa nature, dans son trait de personnalité qui était propre. C'est que oui, il a fondé une structure, mais je n'ai pas l'impression qu'il voulait cristalliser la structure autour de lui et qu'au contraire, être sous le spot lumineux, ça l'embêtait plus qu'autre chose et qu'il s'est un peu auto-forcé sur les prises de parole en public des fois. Ce qui lui donnait, cette désinvolture et aussi cette façon de décomplexer. Il n'y prenait pas plaisir. Il n'y voyait pas d'enjeu pour lui personnel dans son égo. Et donc, il y allait un peu plus tranquille aussi. Et ce n'est pas grave si le projet lui échappait. En t'écoutant parler de ta journée, je me suis dit, tiens, qu'est-ce qui différencie A de Julien? Et c'est peut-être ça. Bon, là, je suis en train de faire sa psychanalyse. Ça se trouve, il me dirait totalement autre chose si on l'interroge.
Speaker 5 Mais c'est marrant, oui, parce qu'en final, à Ouishare, il disait qu'il venait aussi de toute cette culture open source. Mais ce n'était pas A qui amenait la culture open source. C'était un autre des fondateurs B. Oui, c'est vraiment B en plus. qui lui a amené cette culture-là open source. Donc, il y a peut-être un truc comme ça. Mais c'est une tension, effectivement, de, à nouveau, on revient vraiment à la personnalité qui est hyper importante du fondateur parce que ça joue quand même un gros rôle. Si on revient sur le libre, Stallman, il était quand même bien content d'être sous les spotlights. D'ailleurs, c'est un peu pour ça que lui aussi, il s'est fait exclure aussi
Yaël du propre truc qu'il a monté. Merci beaucoup. Merci Meven. Merci Grégoire. Merci Margaux. C'était hyper intéressant. Et comme le disait Karl au tout début, moi, j'en suis en plein dedans. Et en fait, je me disais alors, comment on se positionne, nous, en tant que fondateur? Et c'est vrai que moi, c'est quelque chose. En fait, quand j'ai fondé Le Mouton avec Irénée, on était en deux. On est cofondateurs. Tout de suite, je me suis dit que j'allais rester que trois ans. Et c'est à chaque fois. Donc, finalement, ça fait six ans. Donc, ça, c'est une question. C'est que deux fois trois ans. Ça fait que deux mandats. Non, non, mais c'est toute la question. est là aussi. Mais ce qui fait qu'à chaque fois, et donc à chaque renouvellement de mandat, donc là ça va être le troisième renouvellement, et normalement, je n'en ferai pas partie si tout se passe bien en novembre, mais on s'en reparlera l'année prochaine peut-être pour faire le bilan et voir comment c'est passé. Mais c'était, ouais, toute cette question, moi j'ai l'impression d'avoir, ces six dernières années, accompagné mon départ. Et du coup, c'est un peu, voilà, bref, mon départ et celui d'Irénée. Après, c'est une autre discussion, et tu l'as dit Karl, sur quand on est deux, voilà, parce que ça se passe peut-être pas tout à fait pareil quand on est tout seul. Je vous raconterai ça et que ça permettra peut-être de faire un miroir, mais c'était hyper intéressant. Merci.
Speaker 5 Oui, et je me permets juste de compléter parce qu'en fait, ce que vous ne savez pas, c'est qu'on a mangé ensemble avant. Mais effectivement, je pense qu'il y a aussi un truc à explorer, mais qui est très genré là-dessus. Et je pense qu'effectivement, quand on est... Je pense que hommes et femmes ne vont pas forcément percevoir ce rôle de la même façon, le vivre de la même façon. Et effectivement, aussi en tirer la même rétribution sociale. Et effectivement, je pense qu'il y a clairement un truc qui est lié à ça. Parce que clairement, à nouveau, il incarnait beaucoup de valeurs de ce qu'on associe en général à la masculinité hégémonique. Et le fait que toi aussi, tu sois en mode, vas-y, j'ai envie de partir. Enfin voilà, c'est pas un sujet quoi. il y a un truc aussi de cet ordre là
Yaël et redevenir une membre simple ça ce qui est aussi un autre sujet parce que là c'est vrai quand on parlait des départs des fondateurs c'était de partir complètement de la structure alors que là en tout cas ce qu'on essaie de penser au bouton c'est quelque chose d'encore différent qui est d'être membre mais juste membre et de ne pas prendre part aux décisions ce qui est encore autre chose je vous dirais si ça a marché ou pas c'est pas dit, peut-être que je partirais vraiment complètement pour que ça marche. Du coup, merci beaucoup. Merci d'avoir répondu à nos questions et surtout, merci à vous de nous avoir écoutés. On espère que cet épisode vous aura plu et que peut-être que vous avez pris plaisir à l'écouter, que vous y êtes reconnus. Encore une fois, on est preneur de vos témoignages. Vous pouvez nous écrire à hello.questions-asso.com et vous retrouverez de toute façon toutes les précisions dans la description de cet épisode. Et pour rappel, vous pouvez nous suivre sur votre plateforme de podcast préférée, toujours les mêmes, donc SoundCloud, Spotify, Deezer, Apple Music, Google Podcasts et PeerTube. Maintenant, on est obligé de le dire, surtout chez Pink. Et vous pouvez également vous abonner à la newsletter pour ne manquer aucun épisode. Et cet épisode a été réalisé avec le soutien de la MAIF et de la métropole de Lyon. Et c'est aujourd'hui Guillaume Desjardins de Synchrone TV qui était à la réalisation. La jolie musique que vous allez maintenant entendre est l'oeuvre de Sound of Nowhere. Merci de nous avoir écoutés et rendez-vous le mois prochain pour un nouvel épisode de Questions d'asso.